22.7.13

Banc public

Parmi les joies de l'apprentissage d'une nouvelle langue, il y en a une qu'on attend tous avec impatience et sans retenue, celle des gros mots.
D'ailleurs on ne l'attend pas, on l'attrape avant même d'avoir acquis le passé, le futur ou les différentes règles de grammaire qu'on pense pouvoir éviter, mais qui nous attendent toujours au tournant d'une phrase ou d'une réflexion telle que "ah...27 ans déjà que vous êtes venu vous installer ici...".

C'est sans doute le fait d'avoir arrêté les cours d'hébreux en ce mois de juillet, qui me pousse violemment à m'auto-instruire. Avec joie et l'aide de Danah, bartender qui travaille avec moi dans un café où la clientèle est constituée de 95% de personnes âgées. 

Comme toutes nouvelles leçons on en étudie d'abord ses bases. Rien de bien passionnant, on retrouve comme partout, les "fils de p***" (bien qu'en Israel existe une variante "fils des p***s" ), les "co**ards", "sa**pes", "c*ns"... Toute la série des faciles/rapides/efficaces.

La seconde partie de la leçon traite des plus compliqués, intéressants que personne n'aborde, même pas ceux qui sont nés en Israel. Ce ne sont même plus des gros mots mais des formules insensées.
Cela donne : "Leh tassi hamoutsim !" traduction "Va te faire des cornichons aigres-doux !" ou plus élaboré "Leh tassi hamoutsim bé bichbach !" traduction "Va te faire des cornichons aigres-doux à l'aneth !" (no comment)
On retrouve dans la même famille : "Leh tassi maïm rothim !" : traduction "Va te faire de l'eau bouillante !".
Pas besoin d'être Einstein pour comprendre qu'on évoque ici : non pas l'expérience, mais la patience requise pour préparer des cornichon aigres-doux ou de l'eau bouillante. 

Savoir comment un peuple s'emporte en jurant, peut aussi s'avérer majeur pour approcher d'encore plus près sa culture. Les israéliens, sont tout, tout, tout sauf patients...
Je me demande vraiment qui a dit le premier un truc pareil et je m'imagine aussi la réaction du premier qui l'a entendu.
Il y a quelques semaines en rentrant chez moi, trois vieux messieurs étaient assis sur un banc.
A quelques mètres déjà j'entendais qu'ils se chamaillaient. Au moment où je passe à leur hauteur, j'entends l'un d'eux traiter l'autre de "mouche". Ce dernier lui répond qu'il est une "merde". Ce à quoi le premier rétorque "bah toi tu es une mouche à merde !"
S'en est suivi un fou rire général, fini par un silence.

A ce moment précis je savourais le fait de comprendre enfin de quoi les gens pouvaient se traiter ! 

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