1.9.13

Chacun son truc



Depuis que la situation en Syrie (ainsi qu'en Egypte) est critique, tout étranger en Israël, qui n’a pas l’habitude d’avoir des voisins peu commodes, finit par interroger tous ses amis israéliens pour savoir comment ils gèrent ça.
Sans céder à la psychose ou la panique, juste pour essayer de déterminer le fossé qui pourrait exister entre les médias européens, les médias israéliens et le sentiment général des citoyens ici.
Ce qui m’a frappé d’abord, c’est qu’aucun, je dis bien aucun de mes proches, collègues ou clients du café n’est paniqué quant à ce qu’il pourrait se passer en Israël avec à la situation syrienne. 
L’habitude sans doute…

Ensuite, c’est l’humour qui refait surface. Voici quelques anecdotes que j’entends depuis quelques jours.

Joyce : 54 ans. Depuis 30 ans en Israël.
« Et donc en général, les attaques se faisaient le soir, plus ou moins à l’heure du dîner. Je me souviens d’un soir où on avait commandé des pizzas parce qu’on avait rien dans le frigo. On est en plein dîner et la sirène retentit. Non seulement on avait la flemme de descendre les trois étages pour aller au shelter, mais en plus de ça on avait faim et les pizzas allaient refroidir. Lital (sa fille, âgée à l’époque de dix ans) me regarde et me dis : « oh non pas pendant la pizza ! » On  se lève tous avec une part de pizza à la main, on va dans la chambre la plus hermétique de l’appartement, on commence à mettre nos masques à gaz, mais comment tu veux manger une pizza avec ton masque à gaz ?! »

Elle continue...

« L’automne dernier quand ça chauffait ici je me souviens d’une alarme un après-midi. J’étais chez ma fille Emilie, avec ma petite-fille. L’alarme a retenti, on s’est vite dépêchées d’aller à l’abri. Emilie a attrapé Lia, moi je m’occupais du chien. A peine avoir franchi la porte, la même pensée nous a traversé l’esprit. On venait d’acheter chacune un sac en cuir qui compte bonbon. Sans rien lâcher j’ai filé dans le salon pour récupérer nos sacs, Emilie en a profité pour sauver une paire de bottes qu’elle venait de s’offrir. Ridicule non ? Et inexplicable. »

Elad : 32 ans. Depuis 32 ans en Israël.
« Avec les masques à gaz ils distribuent toujours une petite dose d’Atropine, que tu peux t’injecter en cas de contamination et qui te permet de survivre jusqu’à ton arrivée à l’hôpital. Tu dois te l’injecter seulement quand tu as les premiers symptômes : difficultés à respirer, maux de ventre, vomissements… Beaucoup, avec la panique et au moindre affaiblissement se l’injectent et vont à l’hôpital du coup, car ils se sont fait l’injection pour rien. Je me souviens j’étais petit, on était dans le shelter avec mes parents et tous les voisins de l’immeuble. Les enfants n’avaient pas des masques à gaz comme tout le monde mais des espèces de cagoules complètement hermétiques avec un espèce de petit ventilateur pour les aider à respirer. On vient donc d’arriver dans l’abri, je mets ma protection et après quelques secondes je commence à me sentir mal. J’ai du mal à respirer et j’ai la nausée. Je préviens ma mère qui immédiatement se muni de l’Atropine. Je suffoque et deviens tout rouge, mon père me retire la cagoule, mes parents sont à deux doigts de me l’injecter, mais je reprends peu à peu mes esprits, en fait c’était la cagoule que j’avais qui sentait trop fort le plastique ou le caoutchouc qui me donnait envie de vomir. Tu vois, ça arrive même aux meilleurs d’injecter la dose pour rien… »

Danah, 26 ans. Depuis 26 ans en Israël.
 « Je me souviens que ma mère avait fabriqué un espèce de masque à gaz pour notre chien. Ça ne ressemblait à rien et surtout maintenant je sais qu’il était complètement inutile, c’était juste pour nous rassurer ma sœur et moi. D’ailleurs je crois même que Nina (son chien) avait plus de chance de mourir avec le masque home made que sans. »

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